Retranscription de la conférence sur la colère enregistrée par Thom Bond le 27 février 2023
Vous pouvez retrouver ce texte dans sa version audio ici.
Thom invite tout d’abord à un check-in de quelques minutes puis décide de commencer le partage autour de ce check-in.
Thom nous partage qu’il est excité d’être ici et également anxieux. Non seulement par le travail que nous faisons, mais simplement par le fait d’être un être humain sur cette planète. En fait, le sujet avec lequel nous allons travailler aujourd’hui est profond et Thom le ressent. Il espère que les 90 minutes partagées permettront de pouvoir faire un pas significatif vers la compréhension et le travail de ce genre de sujet qu’est la colère.
Jeff, quant à lui, se sent plein de joie d’être reconnecté à ce groupe. Pour lui, le travail de Thom continue d’être une source d’inspiration après trois ans de pratique.
Julia ressent, quant à elle, un sentiment de très grande confusion et est submergée par le fait d’être un humain sur cette planète ; l’idée en elle-même est si difficile à réaliser et elle se sent également si privilégiée d’être là et de pratiquer et pense que cela doit être encore plus difficile pour les autres êtres humains qui ne pratiquent pas.
Kathy partage qu’elle et son mari sont présents à cette conférence car ils ont besoin d’avancer par rapport à leurs différences et à la colère dans leur couple et elle est remplie d’espoir par rapport à ce qu’elle va apprendre aujourd’hui.
Thom reprend la parole et précise qu’il est impossible que les personnes présentes ne se mettent plus jamais en colère. Chacun d’entre nous aura une certaine forme de colère et de jugement. Et il ne s’agit pas de ne pas l’avoir. Nous allons comprendre pourquoi ce serait impossible pour nous de ne le pas faire, mais il n’est pas question d’abandonner non plus.
Nous n’allons pas arrêter d’être en colère. Mais ce que nous pouvons faire, c’est accueillir cette expérience que nous appelons colère. Et si nous apprenons suffisamment de choses et si notre pratique arrive au point où nous pouvons développer cette vision de l’univers parallèle des besoins, alors nous acquérons une habilité. Nous devenons capables d’avoir une expérience différente lorsque nous nous mettons en colère. Nous continuons à nous mettre en colère, cependant, avec les outils que nous avons, nous pouvons avoir le choix à ce sujet. Il s’agit d’être capable d’avoir l’intention d’avoir plus de connexion et de compréhension avec quelqu’un.
Thom nous propose de regarder la colère d’un point de vue large en termes d’évolution sur la planète. Cette colère est un aspect particulièrement important de notre existence en cette période de notre évolution pour deux raisons : Auparavant quand nous nous mettions en colère, nous avions des escarmouches et parfois même des centaines de personnes mouraient. Mais la façon dont nous avançons maintenant en raison de notre technologie avancée dans la capacité de s’annihiler les uns les autres, nous pouvons faire une chose qui, auparavant, était impossible comme détruire le monde, auparavant nous ne pouvions pas et maintenant si certaines personnes veulent le faire, c’est possible. Donc, si nous voulons continuer en tant qu’espèce, il y a ce petit changement que nous allons devoir faire et c’est que nous allons devoir arrêter de vouloir nous entretuer. Il n’a jamais été aussi important pour nous de pouvoir comprendre cette chose qu’est la colère et de pouvoir la transformer en quelque chose d’autre pour nous, les humains.
Puis Thom regarde ce qu’est exactement la colère et il remercie Marshall Rosenberg d’avoir mis tout cela en évidence et de nous l’avoir transmis. Thom nous partage une citation qui l’a bouleversé : Les gens ne nous mettent pas en colère, c’est ce que nous pensons qui nous met en colère. Vous pouvez dire que c’est vrai ou que ce n’est pas vrai. Ce n’est pas le but de cette citation. Le but de cette citation est de voir l’autonomisation potentielle que nous pouvons avoir, le choix potentiel que nous pouvons avoir lorsque nous pensons de cette façon.
Maintenant, il est vrai que nous avons besoin d’avoir une certaine compétence pour être en mesure de rendre cela logique pour nous. Donc, face à la colère, on peut voir un jugement ou bien quelque chose qui devrait être ou ne devrait pas être et nous avons aussi un besoin non satisfait.
Et donc notre opportunité est d’y penser différemment et donc de transformer nos expériences en quelque chose d’autre. Souvent nous pouvons commencer à blâmer les autres lorsque nous souffrons. Et donc ce que la citation de Marshall fait, c’est qu’elle nous aide à nous rappeler que cette douleur est liée à nos besoins. Et c’est là que nous pouvons comprendre que cet aspect appelé besoins fait partie de notre colère. Et donc nous pouvons faire ce voyage dans la prise de conscience des besoins.
Maintenant, Thom nous propose un outil qui permet de diviser la colère en deux morceaux, d’un côté les jugements et, de l’autre, les besoins. Nous changeons ainsi notre façon de penser.
Thom passe alors à un rapide tour de questions :
Lenny qui demande comment faire quand il s’agit de colère et qu’il n’est pas conscient qu’il est en colère, mais que sa pensée est alors obscurcie. A-t-il même la possibilité de se poser la question : Suis-je en colère ?
Thom lui répond que parfois la colère est l’une de ces choses qui pourraient être si habituelles que nous ne savons même pas que nous sommes en colère. Et donc une partie des compétences dont nous allons parler aujourd’hui est cela : Notre capacité de reconnaître que nous sommes en colère et puis qu’est-ce que nous allons faire de la colère une fois que nous réalisons qu’elle est là.
Magdalene aimerait réfléchir à la question de savoir si la colère peut être transformée en quelque chose de constructif pour apporter des relations plus pacifiques par exemple.
Thom lui répond que c’est possible ou pas. Cela dépend des besoins non satisfaits qui se trouvent derrière cette colère. Cela peut se transformer rapidement ou prendre plusieurs générations. Thom préfère voir cette conférence comme l’apprentissage de pas de danse que l’on ferait avec la colère pour apprendre doucement des compétences de communication non-violente ou tout type de compétences de renforcement de la conscience. Thom utilise la comparaison du football américain : personne ne va se lancer dans un match de Superbowl le lendemain de son premier apprentissage du football. Pour cet apprentissage autour de la colère, il en sera de même, au fur et à mesure que nous apprendrons et pratiquerons plus, nous danserons de mieux en mieux avec la colère.
Julia aimerait savoir si derrière tout ce que nous faisons qui est nuisible, il y a la colère et si nous résolvions la façon dont nous gérons la colère, nous devenions finalement inoffensifs.
Thom pense que des choses désagréables se produiraient toujours, mais qu’une grande partie de l’expérience humaine serait modifiée si nous y arrivions. Pour lui, la différence entre la paix et la guerre d’un point de vue économique est incroyable. Si nous commençons à avoir un monde où il y a plus de paix et moins de guerre et de reconstruction, le monde va s’améliorer. Nos vies s’amélioreront, c’est mathématique. C’est pour cela qu’il est si convaincu que tout cela est à mettre tout en haut sur la liste des choses que nous devons régler en tant qu’espèce pour continuer et mieux que cela, pour avoir une vie pleine de croissance et de sens.
Pour Thom, notre capacité à faire preuve d’empathie envers nous-mêmes et envers d’autres personnes est l’aspect clé pour travailler avec la colère. Si nous développons notre empathie, nous développons la compétence pour être capable de remarquer la colère ou le jugement, puis la compétence pour transformer cela en quelque chose. Nous pouvons voir les choses dans le sens « cela devrait être », « cela ne devrait pas être » ou plutôt « Wow, j’aimerais vraiment avoir plus de cette chose dans ma vie ». Les circonstances sont les mêmes mais la conversation est différente. C’est sur la conversation que nous allons nous entrainer aujourd’hui.
Nous passons alors à la première partie « Comment puis-je savoir que je suis en colère »
Nous avons deux façons de penser :
- La première : « Ils devraient faire cela. Ils ne devraient pas faire cela. »
- L’autre façon est de ressentir comment notre corps se sent.
Thom sait que, pour certains d’entre nous, cela peut être difficile au début de ressentir notre corps. Cependant notre corps est conçu pour nous aider à remarquer les choses et c’est comme un petit instrument. Quand nous sommes en colère, des choses très spécifiques se produisent dans notre corps. Thom reçoit de la tension dans ses bras, dans sa poitrine. Il ressent comme un sentiment de fermeture et c’est une vraie sensation physique.
Cela peut arriver aux plus petits niveaux comme une petite ride d’agacement jusqu’à l’indignation pure. Juste être capable de sentir notre corps est une partie très importante de ce travail.
L’autre façon de faire est de remarquer quand nous avons une pensée à propos de « Je devrais » ou « Je ne devrais pas ». Parfois nous pensons que nous devrions être au-dessus de cela ou agir comme une bonne personne. Mais non, nous sommes juste humains. C’est une question d’être honnête avec nous-même sur ce qui se passe à l’intérieur. C’est ainsi que nous le traduisons en quelque chose d’autre. Il est donc très important pour nous d’être en colère et de le reconnaître. Au lieu de dire « Oh, je me mets en colère. Il faut que j’arrête cela tout de suite » car cela ne nous aidera pas.
Thom commence toujours par ses mots favoris « Qu’est-ce que c’est ? » La raison pour laquelle Thom aime ces mots est que, dès qu’il se pose cette question, c’est le moment où il connait déjà la réponse : ce sont ses besoins et là il peut alors se mettre sur leur piste.
Quand nous sommes en colère, nous sommes comme dans un brouillard, trop occupés à être énervés contre une autre personne et derrière ce brouillard se trouve un besoin qui ne demande qu’à être entendu, quelque chose que nous aimerions vraiment vivre si nous écoutions ce qui se trouve derrière notre colère. Ainsi si nous pouvons créer de l’espace pour entendre « ce qui est », nous trouvons une alternative à notre colère.
Thom nous partage également une idée qui se répand de plus en plus : cette idée que nos besoins ne sont pas satisfaits à cause de quelqu’un d’autre. Et si quelqu’un d’autre répond à ses propres besoins à nos dépens, c’est juste le carburant parfait pour la colère et aujourd’hui par la pratique que nous allons faire, nous avons un moyen efficace et progressif de changer cette expérience humaine.
Nous passons à l’exercice « qu’est-ce que c’est ? » :
Nous allons trouver un petit quelque chose qui est vivant en nous qui ressemble à la colère et le partager pour l’explorer.
La personne 1 donne un jugement qui s’approche de la colère et se pose la question « qu’est-ce que c’est ? » dans une sorte d’exercice d’auto-empathie.
La personne 2 va l’aider à deviner ses sentiments et la personne 3 peut l’aider à deviner ses besoins.
Et une fois que cela est fait, il y a une permutation des rôles dans le trio.
Les questions partagées par Thom pour permettre une introspection sont :
- Qu’est-ce que je ressens ?
- De quoi ai-je besoin ?
- Qu’est-ce que cette pensée de jugement me dit sur moi-même ?
- Qu’est-ce que cela me dit à propos de ce que j’apprécie ?
- Qu’est-ce que cela me dit à propos de ce que je veux dans ma vie ?
Premier Exemple
- Cathyn partage qu’un de ses amis lui a demandé conseil et pour chaque idée présentée, son ami a trouvé 10 raisons pour lesquelles cela ne marcherait pas. Cathyn s’est retrouvée frustrée.
- Sage suggère également la déception. Cathyn ressent aussi de la tristesse.
- Margaret suggère un besoin de clarté et de compréhension.
- Cathyn ressent un manque de connexion, de créativité, d’inspiration, de découverte et de partenariat.
Thom invite alors :
- À s’arrêter une minute
- À imaginer comme un gros aquarium dans lequel bouillonnent tous les besoins et les sentiments
- À apprécier de voir émerger les besoins qui viennent d’être entendus dans cette session d’empathie et
- À en choisir un « Qu’est-ce que cela me ferait si j’arrivais à rencontrer deux pincées de ce besoin et à le mettre dans ma vie ? » et à l’apprécier.
Deuxième exemple :
- Sage a un chat qui n’écoute pas ce qu’elle lui demande de faire et de ne pas faire. Elle se sent frustrée et irritée. Sage aimerait ressentir de l’efficacité, un peu plus d’autorité dans son monde et de respect
- Thom lui demande ce qu’elle ferait si elle avait du respect de la part de son chat.
- Sage lui dit qu’elle ressentirait une certaine facilité, l’impression d’un travail d’équipe, de collaboration avec son chat, plus de joie et plus d’humour.
- Margaret suggère les sentiments : frustré, grincheux, inquiet, épuisé, stressé et peut-être vulnérable.
- Sage confirme que vulnérable est une bonne piste car parfois elle se dit que si elle ne peut pas s’occuper de son chat, qu’en est-il ses compétences dans les autres domaines ?
- Cathyn suggère à son tour l’exaspération et le besoin d’ordre.
- Sage partage que, parfois, elle se sent déchirée car elle souhaite tellement que tous les êtres vivants s’entendent parfaitement, y compris son chat.
- Margaret suggère un besoin d’harmonie, de paix et d’acceptation de ce qui est.
Thom souligne que, par ce genre d’exercice, nous allons plus en profondeur que nous ne l’aurions fait nous-même seul, car nos cerveaux ne fonctionnent pas tous de la même manière et nos vies ne se déroulent pas toutes de la même manière. Donc, nous avons des sensibilités différentes et des sentiments et besoins différents et cela multiplie vraiment l’efficacité de la pratique lorsque nous sommes en groupe.
Des personnes dans le tchat suggèrent à Sage un sentiment de culpabilité par rapport à son chat. Thom souligne alors que la culpabilité est un peu comme la colère. Ce n’est pas seulement un sentiment en soi car elle implique aussi une pensée. Que vous devriez être capable ou que vous ne devriez pas être, et que vous devriez faire quelque chose de différent d’une manière ou d’une autre et c’est donc une pensée.
Troisième exemple :
- Margaret partage que, lorsqu’elle est obligée de répéter quelque chose car la personne à laquelle elle parle ne l’a pas entendu, cela la rend frustrée et elle a l’impression de crier de l’intérieur. Elle se sent frustrée, exaspérée et sans espoir, elle se dit que quelque chose n’est pas bien en elle et qu’elle ne peut pas s’exprimer et être comprise
- Sage lui demande si elle a besoin d’être entendue, comprise et vue pour la contribution qu’elle apporte
- Margaret confirme qu’être vue et entendue est très important pour elle.
- Cathyn demande si Margaret se sent triste et a besoin de plus de considération.
- Margaret se sent plus que triste, elle a le cœur brisé et d’en parler avec le groupe, elle se rend compte qu’elle a besoin de savoir qu’elle compte et qu’elle a besoin de plus de connexion.
Thom en profite pour rappeler la règle des deux respirations :
Quand la personne 2 ou la personne 3 suggère un besoin ou un sentiment confirmé par la personne 1 par un Oui, chacun prend 2 respirations pour laisser de l’espace dans cette démarche d’empathie et accueillir ce qui vient d’être partagé. Un peu comme une célébration silencieuse qui aide à encore plus d’introspection.
Thom revient ensuite sur l’une des formes les plus difficiles de créer des liens avec une personne : le moment où la personne en face de nous est très en colère. Quand une personne en est là, elle pourrait se moquer de ses besoins. La chose la plus importante pour quelqu’un qui est dans cette situation, c’est de sentir que nous comprenons ce qu’elle ressent. Il serait même possible de prendre un point de vue chacal en émettant un jugement dans le même sens que la personne, car parfois la personne n’a pas non plus envie de recevoir ce qu’on pourrait lui dire comme « êtes-vous frustré car vous voulez avoir confiance ? » par exemple. Si nous allons dans le même jugement que la personne, la connexion sera facilitée. Mais Thom confirme que c’est la partie la plus délicate de ce travail : car nous devons plonger dans leur monde de chacal afin d’établir une connexion pour arriver à un espace où il y aura plus de sentiments et de besoins.
Dans cette connexion avec la personne, nous n’allons pas nous fâcher. Nous allons être actifs. Nous pourrons aider. Et pour Thom, c’est la différence. Être en colère peut nous mettre à terre, peut nous prendre notre énergie. Alors que si nous pouvons vraiment nous connecter à ce qui est vivant, c’est le vrai lien avec la vie et c’est là que nous pouvons faire bouger les choses.
Une dernière question est abordée au sujet des conditions de travail. La personne qui en parle est en colère à cause de ses managers qui lui imposent des choses dans un jeu de pouvoir et elle se sent impuissante. Thom lui confirme que cela se manifeste de différentes manières. C’est tellement important pour nous les humains et cela contribue à tellement de choses comme l’expression de soi dans toute notre vie. Nous sommes l’auteur de notre vie et l’une des choses qui se passe quand nous commençons à reconnaître ces choses, c’est que nous découvrons où elles ne sont pas rencontrées et souvent pour beaucoup d’entre nous, nous commençons tout juste à prendre conscience de leur importance et Thom connait beaucoup de gens qui ont changé d’emploi parce qu’ils ont réalisé à quel point il était important pour eux de travailler dans un environnement où les gens se respectaient, où les gens se donnaient le choix. Thom confirme à cette personne qu’elle est sur la piste pour rendre nos vies plus merveilleuses en nous connectant à ces besoins vraiment importants que nous voulons avoir dans le cadre de nos vies. Cela pourrait être un nouvel emploi, cela pourrait être une nouvelle relation. Cela pourrait être un nouvel endroit où vivre. La vie a beaucoup de choses à offrir.
Ainsi se termine cette conférence sur la Colère.